« Kukum » : vivre d’amour et de résilience

Kukum raconte plusieurs histoires: celle des peuples autochtones, celle du Québec d’autrefois ou celle de l’amour profond entre deux personnes. Mais Kukum, c’est surtout l’histoire d’Almanda Siméon: une femme profondément résiliente et amoureuse. 

Par Aurélie Lachapelle

L’adaptation au théâtre par Laure Morali de Kukum, roman de Michel Jean, est réussie haut la main. Mise en scène par Émilie Monnet, la pièce a bénéficié de la collaboration de Joséphine Bacon, « gardienne des savoirs innus » pour l’adaptation du roman. 

La contribution de Joséphine Bacon est claire : sa poésie est là tout au long de la pièce. 

Une « soif d’air frais »

Une « soif d’air frais » : C’est ce qui pousse la jeune adolescente Almanda Fortier (Léane Labrèche-Dor) de Saint-Prime à quitter la ferme où elle a grandi. À 15 ans, elle ira rejoindre son futur mari, Thomas Siméon (Étienne Thibeault), un Nutshimiunnu, Innu de Pekuakami, pour aller vivre avec lui, dans la forêt. 

Optimiste, presque insouciant, le caractère d’adolescente d’Almanda se distingue énormément dans la pièce. Elle n’a pas peur de l’avenir et n’a qu’une seule certitude : l’amour qu’elle partage avec Thomas. Un amour doux, mais puissant, visible et facile à cerner dans les scènes d’intimité. 

« Pétrie de bons sentiments, il faut le reconnaître, l’histoire d’Almanda et de Thomas a néanmoins le pouvoir de redonner aux plus cyniques de nos contemporains une foi inébranlable en l’amour », partage Christian Saint-Pierre, dans sa critique de la pièce dans Le Devoir

Une mise en scène impeccable

Les différents tableaux de la pièce sont séparés par des projections d’archives vidéos: tantôt c’est un peuple autochtone en déplacement, tantôt ce sont des draveurs ou caribous. Avec celles-ci, tout comme l’ambiance générale de la pièce, il est facile de se sentir dans la nature, même en plein centre-ville de Montréal. 

Saluons aussi la conception sonore de Marie-Frédérique Gravel qui contribue à cette illusion de la nature. 

Les dialogues entre personnages autochtones, entre Thomas et sa famille (Sharon Fontaine Ishpatao, Jean-Luc Kanapé), se déroulent en innu-aimun, la langue parlée par les Nutshimiunnu. Les surtitres en français sont affichés sur des télévisions aux côtés de la scène. Joséphine Bacon a traduit quelques passages du livre en innu-aimun. 

Les artistes interprètent également plusieurs chansons en innu-aimun: au mariage des Siméon comme à la mort de Malek, le père de Thomas. 

Une introduction au mode de vie des Innus

Pour un public allochtone, il est facile de s’identifier au personnage d’Almanda Siméon. Tout comme elle, les allochtones sont introduits au monde des Innus à travers le spectacle. En passant par les tentes de sudation ou les techniques d’orientation, comme de laisser des branches dans le chemin, un public allochtone vit la même trajectoire d’apprentissage qu’Almanda. 

« Tu avais raison, la vie est un cercle, et il me ramène à toi mon amour », lance Almanda durant la scène de sa mort, en rejoignant son amoureux. Avis aux cœurs sensibles, c’est une des nombreuses scènes émouvantes.  

« Pour une première création autochtone entre les murs du [théâtre du Nouveau Monde], ce formidable roman d’amour était tout désigné », continue Christian Saint-Pierre. 

La pièce « Kukum », coproduite avec la compagnie de théâtre Onishka, est présentée au théâtre du Nouveau Monde jusqu’au 15 décembre.