Prier en solitaire tout le monde en même temps

Dans un parc surplombé de palmiers, le capot tourné vers la scène, tous les conducteurs écoutent la même chose. Ces gens ne sont pas au Ciné-Parc en train de regarder un film. Ils sont dans une cérémonie religieuse, tous connectés à la chaîne de radio 88,5 FM, en train d’écouter les sermons du pasteur. 

Dans le documentaire Drive-In Jesus, la réalisatrice filme une messe en plein air dans la ville de Daytona Beach, en Floride, aux États-Unis. Les croyants assistent à la cérémonie dans leur véhicule. Le bâtiment beige sur lequel il y a une grande croix brune ne semble faire office que de décoration, lors de cette messe. 

Comme dans une vraie église, du vin et un hostie sont servis. Néanmoins, dans leur cas c’est un service au volant. Les catholiques qui honorent la mémoire de Jésus dans le documentaire sont autant des hommes que des femmes.

Isolés, malgré leur foi commune  

Le soleil plombe et plusieurs voitures s’immobilisent sur le gazon. Le pasteur portant des lunettes de soleil et un chandail à manches courtes rouge avec des rayures s’adresse à la foule ; de la mini fourgonnette à la Chevrolet, en passant par la Cadillac. Ce n’est pas une cérémonie religieuse comme les autres. 

Au début, pour la réalisatrice du documentaire, Lauren Defilippo, l’idée de s’asseoir dans une voiture pour aller à l’église semblait totalement ironique. « Qu’y a-t-il de plus vide de spiritualité et de connexion humaine que d’aller à l’église enfermée dans la plus aliénante des inventions américaines, votre voiture ? », se questionne-t-elle en entrevue avec le NY Times. 

D’ailleurs, le film montre un homme en voiturette de golf se promenant de voiture en voiture, pour ramasser l’argent des fidèles, dans un sac de tissu. Ce contact, aussi impersonnel soit-il, est l’un des seuls de la cérémonie. Les automobilistes arrivent isolés dans leur automobile et repartent de la même manière. 

Au-delà des vitres teintées

« Je me suis sentie tout aussi complice de mon propre isolement derrière la caméra que les fidèles dans leurs voitures, sinon plus », illustre la réalisatrice. 

« Pour moi, l’église drive-in représente un microcosme de ce à quoi nous sommes confrontés au quotidien : essayer de nous connecter les uns aux autres et à notre environnement malgré notre isolement croissant alimenté par la technologie », explique Mme Defilippo. 

La réalisatrice s’est « cachée » derrière un appareil technologique, pour faire un film sur « l’expérience humaine ». 

Repenser l’église traditionnelle 

Bien qu’il y ait environ 370 000 églises aux États-Unis, selon la Hartford Institute for Religion Research, plusieurs personnes décident quand même de vivre leur cérémonie religieuse dans le confort d’une voiture.

Dans une des scènes, un homme est assis dans sa voiture avec son chat. Il joue avec la bête au pelage gris. Le conducteur aborde un grand sourire. Comme l’explique la réalisatrice au NY Times, parfois c’est plus simple pour certaines personnes de faire la messe de cette manière, surtout si le croyant a un animal de compagnie. 

D’ailleurs, le Wall Street Journal rapporte qu’en octobre 2024 les ventes de bibles auraient augmenté de 22% aux États-Unis par rapport à la même période de l’année précédente. Ceci illustre le fait que de plus en plus d’Américains s’en remettent à la foi. 


Selon le Pew Research Center plus de 60% des Américains sont chrétiens. Avec plus de la moitié des habitants d’un pays partageant une même religion, les messes sont appelées à se diversifier.

Pour visionner le documentaire : https://www.youtube.com/watch?v=owazie9ZNBs