27 mars 2025 - Par Verrecchia, Massimo - Catégorie : Sports
Par Frédéric Sauvé, Massimo Verrecchia et Louis Alexandre Voghell
Le Réseau des sports (RDS) fête ses 36 ans en 2025. Depuis ses débuts, la chaîne de télévision a laissé sa marque dans la culture sportive québécoise. De sa création à aujourd’hui, RDS a dû s’adapter pour résister à l’épreuve du temps.
HISTOIRE
Créé en 1989, le Réseau des sports (RDS) fait son entrée dans l’univers médiatique avec un mandat plutôt chargé: offrir aux Québécois et Québécoises une chaîne d’information et diffusion sportive en continu, le tout, en français. C’est le 1er septembre 1989 que le Réseau des Sports entre en onde avec sa toute première édition de Sport 30. Aujourd’hui, après 36 ans d’existence, RDS continue de redéfinir le journalisme sportif en s’adaptant aux nouvelles réalités du monde des médias.
À l’aide d’entrevues avec Chantal Machabée, Vice-Présidente Communications Hockey pour les Canadiens de Montréal et journaliste à RDS pendant 32 ans ainsi que Charles Perreault, Directeur général à RDS, l’objectif est d’illustrer un portrait global du Réseau des sports en plus de comprendre son impact sur le journalisme sportif et l’accès à l’actualité sportive.
Entrevue avec Charles Perreault
Entrevue avec Chantal Machabée
Une nouvelle ère en continu

Avant l’apparition du réseau, l’accès à l’information sportive était assez limité. Il existait bien quelques radios et journaux sportifs, mais aucune chaîne de télévision uniquement dédiée au sport (et encore moins en continu). Certaines parties des Canadiens de Montréal étaient diffusées et il n’y avait véritablement aucune couverture des entraînements.
Il était donc impossible pour les amateurs d’avoir un accès en profondeur au monde sportif. La création du Réseau des sports vient donc répondre à une demande croissante pour une couverture sportive complète et accessible aux francophones.
En 2002, RDS obtient les droits de diffusion pour tous les matchs de saison régulière des Canadiens de Montréal. Cette acquisition offre, par la même occasion, une stabilité à ses partisans, mais également à la chaîne sportive. Avec un accès continu à l’actualité sportive, RDS répond à la demande et connaît un succès grandissant.
Un lancement redouté
Malgré un marché réel et une demande grandissante, beaucoup étaient sceptiques quant à cette apparition. Côté anglophone, The Sports Network (TSN) offrait déjà ce genre de programmation depuis 1984 et les affaires se portaient bien.
Il semblait alors logique que le marché francophone puisse bénéficier lui aussi d’une couverture sportive en continu. Toutefois, selon Chantal Machabée, ancienne journaliste et animatrice à RDS depuis sa création, l’opinion publique redoutait le lancement du réseau. Plusieurs de ses proches ont essayé de la dissuader de ne pas rejoindre RDS.
« À l’intérieur, tout le monde était convaincu que ça allait fonctionner, mais à l’extérieur c’était le contraire ». Elle ajoute également que c’est grâce au recrutement de nouveaux visages voulant faire leurs preuves, combiner à l’expertise de plusieurs journalistes de renom que le lancement du Réseau des sports obtient un aussi grand succès et permet de laisser sa trace dans l’histoire québécoise.
Sports 30 (1989-)
Voici la toute première édition de Sports 30.
Parue pour la toute première fois le 1er septembre 1989, l’émission Sports 30 marque le lancement officiel de RDS. Le concept était assez simple : offrir des résumés sportifs concis et des analyses, tout en permettant aux téléspectateurs de suivre de près les événements sportifs majeurs, que ce soit dans le monde du hockey, du football, du tennis, ou d’autres disciplines, le tout en 30 minutes. L’objectif était de répondre à une demande croissante pour des informations sportives actualisées.
L’émission était diffusée à 18h30 et présentait une sélection des événements sportifs de la journée, avec un mélange de reportages, d’interviews et de résumés de matchs. Son format court permettait de couvrir rapidement l’essentiel de l’actualité tout en captivant les téléspectateurs grâce à des présentations rapides et précises.
La première édition de ce tour du monde sportif a été animée par Serge Deslongschamps et Chantal Machabée. La journaliste se confie sur son parcours : « Quand j’ai commencé, on n’a pas eu de télésouffleur avant le mois de février. Il fallait apprendre nos textes. On avait une caméra. On y allait avec les moyens du bord, mais on savait qu’on embarquait dans une aventure vraiment « tripante». On est privilégiés, on est à Montréal, on couvre les Expos, les Alouettes, le Canadien. »
Après une semaine de pratique, l’équipe sera contrainte de réaliser l’émission en direct en raison de problèmes techniques. Ce n’est pourtant que le début de la saga du 1er septembre, jour de première diffusion: « Et puis, à un moment donné, à 16h, on apprend que le commissaire du baseball majeur, Bart Jamaki, est décédé. Et là, tout ce qu’on avait préparé depuis une semaine, il a tout fallu mettre ça aux vidanges. »
Devant alors recommencer le bulletin en grande majorité, l’équipe dispose de deux heures pour refaire un bulletin sur lequel ils travaillent depuis une semaine. Malgré l’énorme charge de travail en si peu de temps, c’est mission accomplie pour la première diffusion de Sports 30: « Je me disais, wow, je participe à la première émission de l’histoire de RDS. Pour moi, c’était marquant. » Affirme avec passion Chantal Machabée.
Au fil des années, le format de l’émission a évolué, mais son rôle de fournir une couverture en temps réel des événements sportifs a été constant. L’émission a su s’adapter aux nouveaux enjeux médiatiques, comme l’intégration de la couverture en ligne, tout en maintenant la fidélité des téléspectateurs à travers des présentations engageantes et des analyses approfondies.
Sports 30 est aujourd’hui un des piliers du réseau RDS, toujours aussi populaire après plusieurs décennies. Son héritage demeure marqué par une constante recherche de qualité et d’innovation dans la manière de traiter l’actualité sportive.
L’importance de la couverture locale
Les connaisseurs aguerris se souviennent encore du temps où le minigolf était un rendez-vous à ne pas manquer au Réseau des sports. Certains peuvent encore entendre le célèbre biiirdie! En provenance de Serge Vleminckx qui a été la voie du mini-golf au Québec depuis 1989, dès le début des émissions, jusqu’à la dernière année de diffusion en 2000.
RDS s’est toujours démarqué par sa capacité à offrir une couverture approfondie du sport québécois. Contrairement aux grands réseaux anglophones ou aux plateformes de « streaming » internationales, qui privilégient souvent les ligues majeures nord-américaines et internationales, le réseau s’est toujours positionné comme le diffuseur de choix pour les amateurs de sport au Québec.
Cette proximité avec le marché québécois lui permet de mettre en lumière non seulement les Canadiens de Montréal, mais aussi des équipes locales, comme le CF Montréal, le Rocket de Laval et même des ligues plus modestes, comme la LHJMQ, la LPHF, la SLN et la LCF. En donnant une voix aux athlètes d’ici, le réseau joue un rôle clé dans la valorisation du talent québécois et le développement du sport à l’échelle régionale.
Chantal Machabée, qui a vécu l’évolution de RDS depuis ses débuts, souligne cet aspect en faisant un parallèle avec le Bleu-Blanc-Rouge : « RDS, c’était les premiers à couvrir les entraînements, à être là tous les jours. Aujourd’hui, on tient ça pour acquis, mais à l’époque, personne ne le faisait. »
Un autre bel exemple est celui de l’émission Hockey QC. Cette programmation, 100% québécoise, couvre les actualités du hockey-balle partout à travers la province. Une véritable passion pour les amateurs de hockey d’ici.
Dans un paysage médiatique où la compétition est de plus en plus féroce, ce lien unique avec le public québécois demeure l’un des atouts majeurs de RDS
La soirée du Hockey à Radio-Canada (1952-2002)
L’histoire de RDS est intimement liée avec l’histoire des Canadiens de Montréal. Sans le tricolore, il est difficile d’imaginer un univers où le réseau peut avoir un quelconque succès de la sorte. À l’obtention des droits de diffusion pour tous les matchs en 2002, RDS met fin à la fameuse Soirée du hockey diffusée sur les ondes de Radio-Canada depuis 1952, l’une des plus vieilles émissions télévisées au monde.
Animée par René Lecavalier, la programmation de la Soirée du hockey était extrêmement particulière: la diffusion ne commençait qu’à partir de la troisième période. Cette décision est due au fait que l’organisation craignait que les partisans CH privilégient le confort de leur domicile au détriment du Forum de Montréal.
Après la démocratisation du câble, le directeur général du réseau à l’époque, Gerry Frappier, est prêt pour un gros pari: la diffusion de toutes les parties du Canadien. L’obtention des droits avec Radio-Canada se fait plutôt facilement, par contre, le public réagit fortement. En effet, la diffusion anglophone restera à CBC, un canal gratuit, contrairement à RDS qui est payant. Ainsi, lors de la première année, Radio-Canada et RDS. Cette transition, quoique rapide, a facilement été acceptée par le public, qui adhère sans problème au nouveau diffuseur. Un autre pari réussi pour le réseau.
Aujourd’hui, la diffusion des matchs des Canadiens est cruciale à la survie du réseau. Lorsque l’équipe joue du hockey qui « ne compte pas », les cotes d’écoute baissent de façon importante. En 2013, TVA Sports fait l’acquisition des droits de diffusions des matchs du samedi soir ainsi que des séries éliminatoires. Il s’agit des droits nationaux, c’est-à-dire que, pour la LNH, les lundis, mercredi et samedi sont des journées nationales. Cependant, TVA Sports a uniquement acquis les droits du samedi soir pour y créer un rendez-vous.

Les droits de télévision seront de retour à l’encan pour la saison 2025-2026, cependant, les réseaux ne sont pas dans l’urgence d’acquérir plus de matchs. Conserver les acquis actuels serait un bon début, selon leur directeur général, Charles Perreault.
La place des femmes chez RDS : une évolution marquante
Le Réseau des sports est un acteur majeur quant à la présence de la gent féminine dans le journalisme sportif au Québec. Un fait d’armes omniprésent de leur histoire, sont les femmes qui occupent une place grandissante au sein de l’entreprise. Toutefois, cette présence n’a pas toujours été évidente et a demandé persévérance, talent et dévouement, des adjectifs qui résument parfaitement Chantal Machabée.
Dès son arrivée à RDS en 1989, celle qui occupe actuellement le rôle de vice-présidente, communications hockey, au sein du Canadien de Montréal, a su se faire une place dans un monde alors majoritairement masculin. Elle raconte que ses débuts n’ont pas été faciles : « J’étais souvent la seule femme dans une salle de presse remplie d’hommes. Il fallait que je prouve constamment ma légitimité ». Grâce à sa rigueur et à sa passion, elle s’est imposée comme une référence du journalisme au Québec.
Au fil des ans, d’autres femmes ont suivi ses traces et ont pris place à RDS. On pense notamment à Hélène Pelletier, qui a couvert le tennis pendant plusieurs années, Andrée-Anne Barbeau, qui anime L’Antichambre, ou encore Valérie Sardin, devenu l’une des chroniqueuses les plus populaires du 5 à 7. Leur présence a permis de démocratiser le rôle des femmes dans les médias sportifs et d’ouvrir la porte à une plus grande diversité d’opinions et d’analyses.
Charles Perreault, directeur général du Réseau des sports, reconnaît l’importance des femmes dans le succès de la chaîne : « Chez RDS, nous avons toujours valorisé la compétence avant tout. Le fait que de plus en plus de femmes prennent leur place au sein de notre équipe est un signe que l’industrie évolue dans la bonne direction ». Cette vision réaffirme l’engagement de la chaîne à favoriser une représentation plus équitable des sexes.
D’ailleurs, l’apport des femmes n’est pas seulement à l’antenne. Ce dernier mentionne en entrevue que « l’inclusion des femmes ne se limite pas qu’aux postes de journalistes ou d’animatrices, mais aussi aux rôles décisionnels et stratégiques au sein de l’entreprise ».
Aujourd’hui, grâce à des figures inspirantes comme Claudine Douville, Hélene Pelletier, Chantal Machabée et plusieurs autres, le Réseau des sports continue de progresser vers une plus grande égalité des sexes. Le parcours des femmes dans les médias sportifs reste un combat, mais chaque avancement constitue une victoire pour les générations futures.
AUJOURD’HUI
La concurrence
L’arrivée de TVA Sports en 2011 a somme toute redéfini le paysage médiatique sportif québécois. Pour la première fois depuis sa création, RDS se retrouvait face à un concurrent direct dans un marché qui lui avait longtemps appartenu.
L’impact fut particulièrement ressenti en novembre 2013, lorsque TVA Sports a mis la main sur les droits de diffusion des matchs du samedi soir des Canadiens de Montréal ainsi que sur les séries éliminatoires de la LNH. Cette perte a représenté un véritable défi pour le Réseau des sports, qui devait désormais se trouver d’autres manières afin de demeurer pertinent auprès de son auditoire.
Malgré ces inconvénients, RDS a su s’adapter en renforçant sa couverture locale et en misant sur la crédibilité de ses analystes et journalistes de longue date. L’acquisition de nouveaux droits de diffusion, comme ceux de la Victoire de Montréal (évoluant dans la LPHF) et tout récemment les droits pour 21 rencontres de la toute nouvelle équipe des Roses de Montréal (évoluant dans la SLN) ont permis au réseau de conserver une place de choix chez les amateurs de sports. Par ailleurs, avec l’échéance du contrat de TVA Sports en 2025-2026, l’avenir de la couverture des Canadiens reste incertain.
Réseaux anglophones et l’ère du « streaming »
Si RDS a longtemps régné en maître sur la couverture sportive francophone au Québec, la concurrence ne vient pas uniquement des chaînes rivales, comme TVA Sports. Les postes anglophones, notamment TSN et Sportsnet, ont toujours eu une longueur d’avance en raison de leur portée nationale et de leurs ressources financières plus importantes. Une triste réalité à laquelle les médias francophones doivent faire face est la suivante : les jeunes générations, consomment majoritairement leur contenu en anglais, que ce soit du sport, des téléréalités et même les nouvelles.
Toutefois, la plus grande menace vient peut-être du numérique. Avec la montée en puissance des plateformes de diffusion en continu comme ESPN+, DAZN, TSN Direct, Sportsnet NOW ou encore les services directement offerts par la LNH, la NBA et la NFL, les amateurs ont accès à une couverture sportive plus personnalisée et instantanée.
Cependant, le directeur général du Réseau des Sports, Charles Perreault, mentionne pendant l’entrevue que, malgré l’engouement des jeunes envers les produits anglophones, la langue française reste un atout fort chez RDS. Une bonne nouvelle pour les amateurs du câble.
Les réseaux traditionnels doivent désormais rivaliser avec des options qui permettent aux consommateurs de suivre leur équipe favorite sans dépendre d’une chaîne télévisée.
Face à ces bouleversements, RDS n’a d’autre choix que d’innover. Comme le souligne Chantal Machabée : « Les médias traditionnels doivent être plus créatifs aujourd’hui. Avec les médias sociaux et la diffusion en continu, on ne peut plus garder de secrets, tout sort en temps réel. Il faut aller dans toutes les directions, toucher à tout, être là où les amateurs sont. »
Cette adaptation est cruciale pour que le réseau reste solide et conserve sa place dans un monde médiatique en pleine transformation.
Adaptation et changement dans le temps
Avec la venue des réseaux sociaux, les médias sportifs comme RDS doivent s’adapter à la rapidité de l’information. Aujourd’hui, le « beat reporting » est de plus en plus rapide, certains journalistes se font voler leurs « scoops » par des journalistes indépendants. l’actualité n’est plus annoncée par les médias. Les médias doivent se réinventer et approfondir leur analyse de la nouvelle.
Expansion du Réseau
Après un lancement à succès, RDS n’arrête pas de se renouveler, se moderniser et s’étendre
- 2004 : création de RDS info, qui diffuse des émissions sportives 30 en continu.
- 2007 : le réseau passe en haute définition avec RDS HD.
- 2011: lancement de RDS 2 pour multiplier le nombre de sports couverts.